Financement et frais de scolarité, véritable débat de société!
Financement et frais de scolarité, véritable débat de société!
S'il est un sujet sur lequel les opinions divergent, c'est bien sur le financement des études postsecondaires et, par la force des choses, sur les frais de scolarité imposés aux étudiants.
Mais avant de débattre autour des moyens, il apparaît indispensable et nécessaire de définir la société que nous souhaitons bâtir. Quels en sont les grands principes et les grandes valeurs ? Quel est l'héritage que nous souhaitons laisser aux générations à venir ? Comment pouvons-nous faire du Québec une, sinon la société où les gens sont les plus heureux ? Quelle position souhaitons-nous occuper sur l'échiquier mondial ?
En fait, on pourrait résumer le tout plus simplement en posant une question bien simple : Il y a-t-il un plan, un projet ? Une chose est certaine, l'éducation devra se situer au cur de ce projet et en constituer l'âme parce que ses incidences se font sentir dans toutes les sphères d'activités de la société y compris sur le plan du bonheur, tant individuel que collectif.
L'accessibilité aux études postsecondaires
Lorsqu'on demande aux gens si « le Québec devrait s'afficher comme l'endroit où les études postsecondaires sont les plus accessibles en Occident » la réponse est assez catégorique : plus de la moitié (55%) se disent d'accord avec ce positionnement alors que seulement 14% le réfutent et 29% se montrent hésitants à l'appuyer.
Ce sont évidemment les plus jeunes (18-24 ans) qui se montrent les plus enthousiastes face à cette hypothèse (64%), ainsi que ceux qui croient que les jeunes d'aujourd'hui feront de demain une meilleure société (63%), alors que les personnes affichant les revenus les plus élevés (80 000$ et +) y sont les plus réfractaires (44%).
Pour mieux situer l'importance de l'accessibilité aux études postsecondaires, l'IRB, dans une enquête précédente, avait soumit aux répondants 10 des principales préoccupations des Québécois. Sur ces 10, (les répondants devaient en choisir deux), la meilleure accessibilité financière aux études postsecondaires occupait le 6ème rang avec 23% des mentions. Le maintien du système de santé, la question environnementale, la diminution de la pauvreté, la fragilisation du français et la réduction de la dette occupaient respectivement les cinq premières positions.
Les frais de scolarité
Interrogés sur la pertinence d'augmenter les frais de scolarité des étudiants universitaires, la majorité (56%) ne souscrit pas à cette démarche et considèrent plutôt qu'ils devraient demeurer les mêmes (33%) ou être diminués (23%).
À l'opposé, ils sont 10% à penser que ces frais devraient être augmentés substantiellement ou encore légèrement (34%).
Les opinions sont assez tranchées et les profils des deux clans le sont tout autant. Les répondants qui souhaitent des hausses (substantielles et/ou légères) se retrouvent en plus grande proportion chez :
- Les hommes (59%) vs les femmes (29%) ;
- Les personnes affichant des revenus de 60 000$ à 80 000$ (63%) ;
- Les personnes affichant des revenus de 80 000$ et plus (72%) ;
- Les diplômés universitaires de 2e cycle (58%) ;
- Les personnes dont les enfants ont fréquenté, fréquentent ou fréquenteront une école privée (56%) ;
- Les personnes qui se disent d'accord avec le financement des écoles privées (57%) ;
- Les personnes qui voté pour le parti conservateur le 14 octobre dernier (70%).
Mais au-delà de ces données, les deux prochains graphiques démontrent de façon éloquente le combat inégal et perdu d'avance que livrent les partisans du statu quo pour les frais de scolarité ou de leurs baisses parce qu'au Québec, comme dans la plupart des sociétés, les décideurs sont surtout concentrés dans les strates d'âges et de revenus supérieures.
David contre Goliath. Un autre bel exemple d'écart générationnel ou les plus âgés (et les plus fortunés), après s'être sauvés avec la cagnotte, demandent aux plus jeunes de la remplir à nouveau et ces derniers devraient comprendre et accepter gentiment sans rouspéter.
La solidarité et l'empathie, on en a tous jusqu'au moment ou elles atteignent notre portefeuille.
Une question de perception également
Les étudiants universitaires n'ont pas la cote auprès de tous. Ainsi, l'enquête de l'IRB nous apprend que 20% des répondants considèrent que « les étudiants universitaires sont gâtés, bien chanceux et se plaignent pour rien ». Par chance, plus du double (45%) ne partagent pas cette perception alors que le tiers (34%) hésite à se prononcer.
Étrangement, les personnes qui ont cette mauvaise perception se retrouvent en plus grande proportion dans les groupes qui souhaitent une hausse des frais de scolarité pour les étudiants universitaires. Drôle de coïncidence.
- 55 ans et + (28%) ;
- Hommes (27%) ;
- 60 000$ à 80 000$ (28%) ;
- 80 000$ et plus (33%) ;
- Voté Parti conservateur (51%) ;
- Ne croient pas que les jeunes d'aujourd'hui feront de demain une meilleure société (35%) ;
- Que les enfants ont fréquenté, fréquentent ou fréquenteront une école privée (37%) ;
- Qui ne souhaitent pas que les études postsecondaires au Québec soient les plus accessibles en Occident (37%).
Ces perceptions et les gens qui les partagent ne sont pas sans rappeler, il y a quelques années, les profils des lucides et ceux des solidaires. Les points de vue sont-il réconciliables? Les compromis sont-ils pensables? Est-ce possible d'identifier un dénominateur commun et ne créer qu'un seul groupe, solide, mobilisé et dédié? Disons que ce groupe, nous l'appellerions les Québécois.
Des études accessibles, contre un engagement social
Le principe est simple. La société (et son gouvernement) rend les études universitaires les plus accessibles possibles, mais « les diplômés universitaires doivent servir et exercer leur métier au Québec de 3 à 5 ans après l'obtention de leur diplôme avant qu'ils puissent pratiquer ailleurs ».
L'idée de ce « contrat » plaît énormément, car près des deux tiers des répondants (62%) adhèrent à ce principe alors que seulement 19% le rejettent et 18% hésitent à prendre position. Cette idée s'avère plus favorable au fur et a mesure que les répondants vieillissent atteignant même 71% chez les 55 ans et plus alors qu'elle décroît avec leur niveau de scolarité.
Cet engagement pourrait aller plus loin, et ceux et celles (on en connait tous) qui ne cherchent qu'à profiter des avantages d'un système pour le délaisser sitôt les avantages passés y penseraient à deux fois avant d'ignorer ou de briser cet engagement.
Ainsi, près des deux tiers des répondants (60%) seraient d'accord « qu'on oblige les diplômés universitaires à rembourser au gouvernement le réel coût de leurs études s'ils décident de s'expatrier sitôt leur diplôme obtenu », alors qu'un maigre 13% s'opposent à cette mesure.
Les hommes (61% vs 49%) sont plus nombreux à souscrire à cette idée que les femmes, idée qui croie avec l'âge des répondants et leur revenu, mais qui décroit, encore une fois, avec leur niveau de scolarité. Il est facile de voir que ceux à qui cette mesure s'adresserait s'y montrent davantage réfractaires, mais même encore là, le principe plaît et regroupe nettement plus de gens qui y sont favorables que l'opposé.
Cette idée n'est pas nouvelle. L'armée canadienne fonctionne selon un principe similaire. Il ne suffit que d'un peu de courage et de leadership de la part de nos politiciens, deux ingrédients difficiles à trouver et à réunir depuis déjà plusieurs années.